COMMENT MAÎTRISER LA RÉGLEMENTATION HSE D'UN AUTRE PAYS?

Un effort soutenu en 5 grandes étapes. 


Tout professionnel HSE se doit de connaître la réglementation du lieu où il exerce. C'est une évidence.


Mais qu'en est-il de ceux qui exercent dans plusieurs pays? Ou encore de ceux qui exercent dans des fédérations où les exigences légales varient d'une région à l'autre, comme au Brésil, au Canada ou aux États-Unis? Comment ces professionnels s'y prennent-ils? Comment font-ils pour maîtriser plusieurs ensembles de réglementations HSE?

En fait, il est relativement facile pour un spécialiste de rapidement assimiler l'essentiel de la réglementation HSE d'un autre État. Ça nécessite néanmoins un effort soutenu qu'on peut présenter en 5 étapes.

1. Maîtriser les Aspects Techniques

Bien que ce soient des textes juridiques, les réglementations HSE sont presque toutes établies à partir d'éléments techniques universels. Il convient avant tout de les maîtriser.

Aspects techniques
Les propriétés chimiques des substances dangereuses, par exemple, ou les risques d'accidents et les maladies professionnelles, ou bien encore les mesures de prévention et de lutte contre l'incendie, sont tous des savoirs scientifiques immuables dans l'espace.

D'ailleurs, de nombreuses multinationales développent des procédures HSE qui s'appliquent à niveau global et sont souvent plus restrictives que les réglementations nationales.

Il convient aussi de rappeler que les normes ISO, comme celles des systèmes de gestion 9.00114.00145.001 ou 50.001, si précieuses aux professionnels HSE, sont également internationales. Même si ce ne sont pas des lois, elles s'appliquent de la même manière dans tous les pays, depuis la définition des politiques jusqu'aux méthodes d'audit.

Il faut donc avant tout dominer les aspects techniques de la profession. C'est la base. Sans cela, il est de toute façon impossible de bien maîtriser la réglementation HSE sur son propre lieu de travail. Ensuite, il faut bien connaître l'essentiel de la réglementation d'au moins un pays. Enfin, et c'est là que commence notre aventure, il est possible de mettre en place certaines actions dirigées qui permettront un apprentissage rapide d'autres réglementationsà commencer par l'établissement de parallèles.


2. Établir des parallèles

Que ce soit dans le domaine de la sécurité du travail ou de la gestion environnementale industrielle, les réglementations HSE sont généralement très similaires d'un État à l'autre. Cette similitude peut surprendre au premier abord, mais elle s'explique logiquement par trois grands principes.



D'abord, et comme déjà mentionné, les réglementations techniques partagent une origine commune: elles sont toutes issues des mêmes connaissances scientifiques de base.

Ensuite, de nombreuses réglementations nationales découlent directement d'autres réglementations nationales. De fait, pourquoi ne pas profiter d'efforts antérieurs pour l'établissement de grands cadres juridico-techniques? Cette pratique est particulièrement courante dans les pays en développement qui s'inspirent le plus souvent de systèmes préétablis en Europe ou aux États-Unis. Ce phénomène porte même un nom, la tropicalisation, souvent un euphémisme pour qualifier une simple traduction agrémentée d'une petite adaptation au contexte local.

Enfin, les réglementations nationales tendent à se rapprocher les unes des autres pour des motifs évidents de standardisation à l'heure de la mondialisation. Les règles  de sécurité pour le transport des marchandises dangereuses, par exemple, sont grossièrement les mêmes dans toute l'Union Européenne, et même déjà aujourd'hui à niveau international.

Ayant eu la chance de travailler en HSE en Europe, en Amérique du Sud et en Amérique du Nord, je peux témoigner de similarités parfois même assez étonnantes. En prenant trois exemples du cas spécifique de la France et du Brésil, on observe des correspondances quasi parfaites entre:

  • Tout les mécanismes du CHSCT et de son équivalent brésilien, la CIPA - Comissão Interna de Prevenção de Acidentes qu'on peut traduire comme Comité Interne de Prévention des Accidents;
  • Le système en ligne GEREP et son équivalent brésilien, le RAPP - Relatório Anual de Atividades Potencialmente Poluidoras do IBAMA, traduisible en Rapport Annuel des Activités Potentiellement Polluantes;
  • Le système d'autorisation préfectorale pour les ICPE et le permis d´opération émis para les agences environnementales, licença de operação ambiental, en Portugais.

Les institutions officielles de référence dans le domaine HSE ont des équivalents presque absolus dans la plupart des pays, comme l'INRS pour la sécurité du travail ou l'INÉRIS pour la gestion environnementale industrielle en France. Ces institutions constituent des sources d'information incontournables car elles fournissent gratuitement sur internet une foule de renseignements, aussi bien génériques que détaillés. Mais encore faut-il pouvoir les lire couramment.



3. Développer sa capacité d'apprentissage


3.1. Maîtriser la langue

Avant de se plonger dans l'apprentissage d'un nouveau cadre juridique HSE, il est essentiel de bien en maîtriser la langue.

Même si l'étude d'un nouvel ensemble de réglementations HSE peut aider à s'améliorer dans une langue étrangère, notamment par l'acquisition du jargon spécifique au domaine, il est pratiquement impossible  d'apprendre ces réglementations sans posséder au préalable une bonne connaissance de leur langue d'origine, au moins pour la lecture.

Maîtriser la langue est donc un point de départ à partir duquel il convient ensuite à chacun de développer ses propres méthodes d'apprentissage. Et pour appliquer ces méthodes, on peut distinguer au moins 4 grands puits d'information: l'internet, le smartphone, les livres et les cours.


3.2. Dévorer les sites spécialisés

Il ne s'agit pas de passer des heures à naviguer sur internet en dilettante, mais d'absorber le plus d'informations pertinentes en le moins de temps possible. On peut diviser le processus initial en 3 étapes:
  • Compiler une liste de favoris avec environ 10 sites officiels riches en informations fiables et de qualité;
  • Lire attentivement à peu près toutes les informations disponibles, en suivant les liens à sa guise;
  • Écrire des résumés pour garantir une bonne assimilation.
Personnellement, je résume certains de mes apprentissages sous la forme d'articles de blogs. J'en profite également pour compiler des dossiers électroniques avec les principaux documents de référence sur chaque thème important.


3.3. Savoir tirer profit de son smartphone

Votre téléphone portable peut également se révéler un excellent compagnon. Des références importantes, comme l'ADR ou le TMD, peuvent facilement être consulté de sa poche en pdf à tout moment.

Il existe aussi d'excellentes applications spécialisées à télécharger, comme le 'Code du Travail' de Mendamsoft en France ou le 'Dangerous Goods Manual' de Knorre. On peut encore citer le remarquable 'Réponses SST' du Centre Canadien d'Hygiène et de Sécurité au Travail.

  
3.4. Adopter des livres de référence

Pour constituer un savoir, le monde digital est indispensable. Mais sous certaines conditions, les livres physiques présentent encore des avantages non négligeables. D'abord, ce sont des objets qu'il est plus facile de consulter dans certains lieux. Il est également très simple d'y faire des annotations et d'y revenir à tout moment. Et j'ai aussi l'impression qu'il est plus facile de mémoriser leur structure que celle d'un site ou d'un livre électronique. De toute façon, toutes les informations ne sont pas disponibles en ligne et les livres restent encore l'unique source pour certains savoirs très spécialisés.

S'il ne faut en citer qu'un parmi ma liste de livres compagnons en HSE, ce sera Hazardous Waste Management de Michael Lagrega, aux éditions McGraw-Hill, qui me suit depuis 1999.


3.5. Suivre des formations

Les formations sont une des options d'apprentissage les plus évidentes, surtout pour ceux qui ont du mal à apprendre seul. Les certificats servent aussi souvent à attester les connaissances acquises.

Que ce soit des cours présentiels ou à distance, ou encore des formules hybrides (comme celles du CNAM), et sans oublier les séminaires, workshops, colloques, forums, congrès, conférences et autres symposiums, il existe aujourd'hui une véritable profusion de formations en HSE.

Les bonnes options gratuites, comme l'excellent site de e-formation de l'INRS, sont malheureusement encore assez rares. Et puisqu'il faut généralement investir un peu, il convient de choisir avec grande attention non seulement la formation en soi, mais également l'organisme ou le professionnel qui la délivrera.
  
En suivant ces quelques conseils d'apprentissage avec discipline, il n'est pas étonnant qu'un relatif étranger parviennent rapidement à surcompenser, c'est-à-dire, à devancer les spécialistes HSE locaux souvent trop à l'aise sur leurs acquis décadents. À l'image des intrigues au cœur de Danse Avec les Loups ou de l'Homme Qui Voulut Être Roi, ou, plus prosaïquement, de ces ethnologues qui finissent par surpasser les indigènes dans la connaissance et le respect des coutumes locales, c'est un phénomène somme toute assez classique.



4. Ne pas s'en tenir à la forme

Les aspects administratifs peuvent souvent dérouter, voire rebuter. Cependant, face aux enjeux juridico-techniques propres aux activités de HSE, les formalités doivent être appréhendées comme ce qu'elles sont, c'est-à-dire, des éléments secondaires variables auxquels il faut constamment s'adapter.



Les règles évoluent de façon permanente et les formulaires ne sont que des détails changeants, même au sein d'un même pays. Il convient donc de saisir la structure des réglementations et de leur application, mais aussi d'adopter une vision plus ample et ne pas s'en tenir qu'à la forme. Il faut également rester parfaitement conscient de ses inévitables limitations.



5. Connaître ses limites

Les normes ou les lois qu'un spécialiste en HSE connaît par cœur se limitent généralement à quelques extraits. On n'oublie. C'est une fatalité. Et quand bien même notre mémoire ne nous ferait pas défaut, nous serions encore sujet aux aléas des textes mouvants.


C'est pourquoi les bons professionnels reviennent habituellement s'abreuver à la source et que les grandes entreprises souscrivent fréquemment à des systèmes de veille réglementaire.

Le travail en équipe est également fondamental,  tout spécialement pour un responsable HSE. L'écoute bienveillante et le partage des informations sont des facteurs clé du succès, car le savoir commun surpasse presque toujours les connaissances individuelles.

Enfin, il est essentiel de savoir délimiter son champ d'expertise. Si un doute subsiste, il faut avant tout questionner. Un auto-examen réaliste et responsable est nécessaire. Il évite toute prise de risque inutile, aussi bien pour soi même que pour les autres. 

Il n'y a absolument aucune honte à reconnaître les limites de ses compétences, qu'elles soient pratiques ou théoriques. L’honnêteté intellectuelle est même peut-être la première qualité d'un bon professionnel HSE et figure de façon proéminente dans tous les bons codes de conduite en la matière.



Conclusion 

Vous savez que vous ne savez presque rien, mais vous savez aussi distinguer entre ce que vous savez et ce que vous ne savez pas? Si votre réponse est affirmative, alors votre route est déjà toute tracée. Ne vous arrêtez pas en chemin. Comme dirait Gandhi, « il n'y a pas de chemin vers la connaissance, la connaissance est le chemin ».


  

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